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Café Compagnon :
bistrot de bonne
compagnie
Janvier 2022
CONVERSATIONS
Café Compagnon : bistrot de bonne compagnie
C’est le bistrot copain par excellence, celui qui vous accompagne du premier café du matin au dernier verre du soir. Un lieu lumineux qui accueille à bras ouverts pour un petit-déjeuner en solitaire, un déjeuner de travail confidentiel ou un grand dîner entre amis. Cette vision en continu de l’hospitalité au restaurant est celle que défend Charles Compagnon dans son dernier café moderne près de Montorgueil. Un espace de vie savamment décoré par sa compagne, la designer Gesa Hansen. Visite guidée de leur cocon blanc et blond autour d’un café-crème.
Pouvez-vous nous raconter la naissance de ce lieu ?
Gesa Hansen : Charles cherchait un endroit en retrait, au calme, pour créer un restaurant cosy et protégé en plein cœur de Paris. J’ai souhaité, de mon côté, que, dès l’entrée, on s’y sente enveloppé. C’est pourquoi j’ai fait poser de lourds rideaux à carreaux sur-mesure dans un motif très simple mais spectaculaire qui annonce cette immersion dans un lieu singulier.
Charles Compagnon : On a la chance d’avoir une clientèle très fidèle qui est ravie que l’on ouvre une adresse un peu plus élégante et centrale, où l'on peut réserver - ce qui n’est pas le cas dans nos deux autres établissements (NDLR : Le 52 et Le Richer).
Gesa, quelle a été votre principale inspiration pour le design ?
G.H : Dans ma famille, la notion d'héritage est très forte ; mon label s’appelle d’ailleurs The Hansen Family. Sur ce projet, j’ai exploré la fibre artistique de la famille de Charles. C’est dans un livre qui retrace l'œuvre de son grand-père espagnol (NDLR : le sculpteur Carlos Ferreira de la Torre) que j’ai trouvé la clé : un joli croquis de silhouette, parfait pour illustrer l’esprit du Café Compagnon. C’est d’ailleurs devenu le logo du restaurant. De la même manière, il fallait que je m’approprie ses sculptures de bronze monumentales : je les ai donc mises à plat sur du bois qui a ensuite été appliqué sur les miroirs.
L’artisanat est donc central au Café Compagnon ?
G.H : Oui, c’est important que l’on retrouve cette patte artistique dans chaque détail. Par exemple, les cartes des vins en papier marbré sont faites à la main par l’artisan Baykul Baris Yilmaz. Il y a aussi des céramiques du designer danois Kristian Sofus Hansen et de l’artiste d'origine cubano-équatorienne Bianca Lee Vasquez.
C.C : Le savoir-faire de Gesa a permis de fédérer tous ces talents qui ont contribué à donner vie à ce lieu. Nous avons été beaucoup soutenus par ceux qui ont œuvré à nos côtés dans ce projet, en particulier par notre ami Vincent Frey (NDLR : l’un des propriétaires de la maison de tissus Pierre Frey).
Lorsqu'on arrive, il y a un réel contraste entre la terrasse très parisienne et l'intérieur qui tient du cocon…
G.H : Je suis germano-danoise et depuis que je vis en France, j’adore cette tradition des terrasses. J’avais envie que celle-ci soit très joyeuse, avec une ambiance qui rappelle presque la Riviera ! La façade quant à elle devait rester claire ; j'ai donc composé autour de cela. Dehors, la couleur rose, légère, badine, qui donne envie d’entrer. Dedans, le bordeaux, plus chaud, plus dense, combiné au velours doré qui donne envie de rester.
Sur la porte d'entrée, on remarque ces immenses poignées torsadées au toucher très sensuel. D'où vient ce design qui est devenu votre signature ?
G.H : Il y a quelque temps, en posant mon pied sur la barre torsadée d’une vieille table en Ecosse, j’ai eu une sensation puissante de déjà-vu : la table de mon enfance venait de se rappeler à mon souvenir par la force du toucher ! J’ai ensuite élaboré autour de ce motif pour le rendre plus contemporain et faire en sorte qu’il puisse être fabriqué en bois, ma matière de prédilection. On le retrouve notamment sur les poignées de porte et les pieds de table du Café Compagnon.
Comment avez-vous conçu l’espace du restaurant ?
G.H : Il y a une grande partie brasserie et d’autres espaces plus intimes comme une “salle des tapas” modulable ou un petit salon presque caché. Les vitres sont séparées de la rue par des rideaux en lin à la new-yorkaise, brodés de motifs liés à l’univers du café par la créatrice Audrey Demarre. Dans la salle principale, dès la première esquisse, j'ai imaginé cette imposante banquette au milieu qui donne de l’aplomb à l'endroit car je suis une inconditionnelle des grandes brasseries comme le Bouillon Chartier ! Le motif triangulaire dans le bois des banquettes est emprunté à Brancusi et crée un contraste géométrique intéressant avec les luminaires ronds en cuivre du plafond.
L’encadrement de la cuisine en marbre rouge est très spectaculaire, de même que l’imposant bar en bois aux allures de bateau…
G.H : On en a longuement discuté car Charles voulait fermer la cuisine, tandis que je tenais à ce qu’elle soit visible. Cela me semble essentiel de voir d'où vient l’assiette ; on l’a donc ouverte en partie. On a également beaucoup réfléchi au matériau pour l’encadrer : l’inox était trop froid, le carrelage trop italien, alors on a eu cette idée radicale du tout-marbre. Cette pierre rouge d’Alicante, c’est le matériau du boucher par excellence ! Utilitaire, il devient très chic mis en scène de la sorte. Quant au bar, ma source d’inspiration est en effet le petit bateau de mon père sur lequel je passais des heures, petite, et où chaque objet avait sa place.
Charles, comment cette approche artisanale et sélective se transcrit-elle dans le choix des producteurs ?
C.C : Dans nos assiettes, le chocolat vient de chez Nicolas Berger, le jambon de chez Ospital et la rhubarbe, en saison, des Jardins de Courances… Le chef Geoffrey Lengagne, qui est très impliqué dans le sourcing, effectue un vrai travail de recherche. Nous sommes aussi ravis de pouvoir proposer nos propres boissons, en l'occurrence nos cafés et nos vins. Depuis deux ans, nous produisons en effet six cuvées tirées de nos propres vignes bio dans le Beaujolais. Je suis sommelier depuis quinze ans maintenant, et à force de fréquenter des vignerons, je m’y suis mis ! Quant au café de spécialité, j’ai commencé à en boire grâce à Coutume (NDLR : maison de torréfaction parisienne pionnière) il y a quelques années. J’ai d’abord appris à me servir d’une bonne machine de barista puis à torréfier grâce à l’atelier collaboratif The Beans on Fire. Il y a quatre ans, j’ai investi dans mon propre petit torréfacteur.
Que mange-t-on au Café Compagnon ?
C.C : Une cuisine de bistrot qui allie le classique et le moderne, avec des touches créatives, dans le respect absolu des saisons bien sûr. Par exemple, on peut y commander un granola maison le matin, un sashimi de truite ou des gnocchis de courge au déjeuner… Tandis qu’au dîner, on y retrouve des recettes plus traditionnelles telles que les croquettes de bœuf sauce gribiche ou la canette façon Apicius (NDLR : une recette phare inspirée du grand cuisinier des années 1980, Alain Senderens).
Y a-t-il déjà un plat iconique chez vous ?
C.C : La tarte au chocolat est devenue incontournable : elle n’est pas prête de quitter la carte ! Gesa a même vu une cliente en commander deux en guise de repas… Et pourquoi pas !
Valentine Benoist
Café Compagnon
Ouvert tous les jours, de 8h à 1h du matin
22-26 rue Léopold Bellan
75002 Paris
+33 9 77 09 62 24
https://groupe-compagnon.com/pages/café-compagnon
Crédit photo : Olivier Toggwiler