«L’argent comptant est roi» dans la construction, et le demeurera, surtout si l’on tient compte du fait que cette industrie doit constamment financer des projets d’envergure, résister à de longs cycles de recouvrement et gérer des dépassements de coûts. De plus, ses acteurs doivent investir de grosses sommes pour assurer la croissance et la modernisation de leurs activités dans un environnement de plus en plus concurrentiel.
Il est impératif d’améliorer les flux de trésorerie dans l’ensemble de l’industrie, mais cela doit d’abord passer par un changement de culture. Pour opérer ce changement, il faut s’attacher à trouver de nouvelles façons d’accroître l’efficacité opérationnelle, à instaurer le changement en interne et à prendre la responsabilité d’améliorer les interactions entre les responsables des projets et les partenaires de l’industrie. Les avantages que chacun en retirera seront considérables.
Paul Raboud, directeur du conseil d’administration de Bird Construction et ancien président de l’Ontario General Contractors Association, et Bill Black, président de la Calgary Construction Association, répondent à des questions pertinentes sur les défis en matière de flux de trésorerie et partagent leurs réflexions sur les changements nécessaires dans le secteur de la construction.
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Paul Raboud, Directeur du conseil d’administration de Bird Construction et ancien président de l’Ontario General Contractors Association
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Q. Les changements continus entraînés par la législation sur les paiements rapides seront-ils facilement adoptés dans l’ensemble des chaînes de valeur de projets?
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Bill Black, Président, Calgary Construction Association
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Q. Les changements continus entraînés par la législation sur les paiements rapides seront-ils facilement adoptés dans l’ensemble des chaînes de valeur de projets?Bill Black: L’adoption ne sera pas nécessairement facile. Il faudra beaucoup de temps avant que tout se mette en place et la méthode employée pourra déplaire à certains. Chaque province le fera à sa manière et l’uniformité constituera un défi. Par contre, il s’agira tout de même d’un progrès. La législation est une étape positive: elle permet d’établir une norme. Aussi difficile ou interminable que puisse être l’établissement de lois sur les délais de paiement, l’alternative, c’est-à-dire l’absence d’une telle législation, se traduira par un stress continu particulièrement ressenti par les petites et moyennes entreprises. Nous ne pouvons pas nous permettre de financer des projets pour lesquels certains retardent les paiements. Très franchement, il y a trop d’entités pour qui le fait de ne pas payer ses factures est devenu un moyen de pression sur les fournisseurs de services de construction, les experts-conseils et les entrepreneurs spécialisés. Et certaines personnes ne voudront pas perdre ce pouvoir.
Q. Quelles sont les principales mesures que les petites et moyennes entreprises peuvent prendre en interne pour améliorer leur position et leur rendement?Bill Black: Elles doivent considérer leur entreprise comme telle. J’ai vu certaines entreprises chercher à décrocher des contrats en fonction du volume plutôt que des profits. Pour survivre dans un contexte économique difficile et exigeant, il faut se concentrer davantage sur la rentabilité, car au bout du compte, le volume ne suffit pas. Il faut refuser les mauvais projets. Il ne faut pas travailler pour des gens qui ne paient pas. Il ne faut pas travailler pour des gens qui gèrent mal leurs projets, car vous finirez par payer pour gérer les problèmes qui surviendront sur le chantier. Vous devez très, très bien connaître vos coûts, savoir distinguer les bonnes affaires des mauvaises et viser la rentabilité, et non le volume.
Q. Quels autres changements faut-il apporter à l’échelle de l’industrie pour régler les problèmes persistants?Bill Black: L’industrie doit continuer à réfléchir à la diversité, plus particulièrement à l’inclusion d’un plus grand nombre de femmes, car il s’agit encore d’un milieu dominé par les hommes. Il faut réfléchir attentivement à la relève et aux façons d’intéresser les jeunes du secondaire aux métiers de la construction pour qu’ils décident de faire carrière dans cette industrie. Actuellement, on se dit encore: «Si tout le reste ne fonctionne pas, je pourrai toujours travailler dans la construction.» C’est dommage que la construction soit considérée comme un choix de dernier recours. Je ne crois pas que nous ayons fait du bon travail sur le plan de la promotion et de la défense de notre industrie et nous ne sommes pas parvenus à démontrer à quel point l’industrie de la construction est une excellente occasion pour les jeunes, les femmes et les nouveaux Canadiens. L’une des principales lacunes de l’industrie est le manque de collaboration entre les différentes disciplines. Les entrepreneurs généraux, les entrepreneurs spécialisés, les architectes, les ingénieurs et les propriétaires devraient prendre le temps d’apprendre à collaborer. C’est pourquoi il faut accorder de l’importance aux initiatives qui rassemblent les différents intervenants et leur permettent de discuter ensemble des enjeux de l’industrie. Par exemple, le but du Calgary’s Owners, Architects, Engineers, and Contractors Group est de réunir tous ces différents organismes pour discuter des problèmes qui nous concernent tous et de tenter d’établir un dialogue et des initiatives qui nous aideront à mieux travailler ensemble. Un autre problème est la pauvreté technologique de nos entreprises. Notre industrie doit être plus novatrice, mais lorsque tout le monde se bat contre la diminution de ses marges et de sa rentabilité, il devient difficile d’investir dans l’innovation puisque celle-ci représente des heures nonfacturables. Nous devons également mettre en place des processus rapides pour l’approbation des factures, l’approbation des travaux et la gestion de la qualité. Ces processus ne doivent pas prolonger les délais de paiement. Nous avons donc besoin à la fois de processus rapides et d’une législation sur les paiements rapides pour que tous soient tenus de respecter une certaine norme. Une partie du problème réside dans le fait qu’on ne crée pas de logiciels pour des entreprises de huit employés. Nous avons besoin d’un système qui s’inspire d’Autodesk, c’est-à-dire qui soit modulable en fonction des besoins des petites entreprises et de ceux des plus gros joueurs. Nous aurions ainsi un portail ou contrat commercial ainsi qu’un volet modulable pour les entrepreneurs spécialisés, et nous pourrions commencer à créer un modèle efficace dans le cadre duquel les entrepreneurs spécialisés recevraient une somme minime pour participer au système, somme qui s’inscrirait dans un abonnement à grande échelle. Ainsi, nous aurions tous accès à un système, relié lui-même à un système central, et les flux d’argent, d’information, d’exigences et de communications seraient regroupés sur une seule plateforme. Cela ferait toute une différence! |
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Le présent article est présenté à des fins d’information générale uniquement. Il n’a pas pour but de donner des conseils juridiques ni n’exprime une opinion sur quelque question que ce soit. Il ne doit pas être considéré comme étant exhaustif et ne peut remplacer des conseils professionnels.